jeudi 18 septembre 2008

Le bazar Kely

Pendant mon séjour à Toamasina, Célia travaille, donc je me trouve avec le plus clair des journées libres. Notre excellente femme de ménage, Lala, pourrait s'occuper de la plupart des tâches ménagères. Elle pourrait préparer à manger, ou nous pourrions faire nos courses une fois par semaine dans un supermarché occidental. Ca ne se passe pas ainsi parce que je joue à l'homme au foyer.

Pour le touriste, que je suis, les tâches quotidiennes, se nourrir, faire les courses, chasser les cafards, discuter avec le gardien de la maison, ont une dimension de ludique. Il parcourt la gamme des plats exotiques du cru, s'amuse du nombre les blattes et de termites, négocie des prix insignifiants, etc : il joue à s'intégrer dans un environnement qui n'est pas tout à fait sa réalité, puisqu'il en partira dans quelques semaines.

Je joue donc le rôle d'un homme au foyer. L'aspect le plus excitant de ce jeu est d'aller faire les courses à Toamasina.

Quand on vient d'Europe, la ville peut paraître pauvre et ses magasins uniformes. Quand on vient d'agglomérations malgaches plus petites (ce que les citadins appellent " la brousse ", habitée de " broussards "), le point de vue change : Toamasina devient un centre cosmopolite opulent où on trouve tout, en plusieurs versions, et en abondance.

Presque tous les jours, je prends donc mon vélo chinois avec une liste de courses.

Au début, je fréquentais surtout les trois supermarchés, qui proposent des produits qui comblaient mon goût pour l'exotisme. Le jeu consiste, bien entendu, à préférer aux produits français les équivalents locaux ou à défaut africains ou du sous-continent indien. Madagascar a une industrie agro-alimentaire qui couvre une large gamme de produits : Tiko (la fameuse entreprise du président) pour les produits laitiers, Taf pour les épices, Codal pour les miels et confitures, Robert pour les chocolats,...

Pour les fruits et légumes, il y a des boutiques partout dans les rues au alentours de la maison. Quand je suis arrivé, c'était l'hiver : le froid relatif réduisait le choix à quelques légumes et à des bananes. Maintenant les mangues, mandarines, ananas, sont plus courants. Le jeu consiste aussi à s'arrêter dans les gargotes, les fast-food locaux, pour goûter les plats proposés. La plupart des préparations sont frites. Les plus réussies sont à mon avis les samosas, les mini-poivrons, et des petites boulettes de graines germées.

Peu à peu, je me suis enhardi, quittant le supermarché et m'aventurant dans les marchés. D'abord, il y a le bazar Bé, au centre de la ville. C'est une halle comme on peut en trouver en France, un peu délabrée, avec des toiles d'araignées fantastiques au plafond. Les stands sont bien agencés et une bonne partie est consacrée à des produits touristiques (épices, artisanat soigné). Les produits sont luxueux et les prix pour les vazahas sont exagérés.



Puis j'ai découvert le bazar Kely. C'est un marché excentré, de deux hectares environ, donc bien plus étendu que le marché de centre ville (paradoxalment car bé = grand, kely = petit).

Il est construit sur des dalles de béton. Au milieu court une tranchée d'égouts (presque) à l'air libre et il y a quelques bâtiments en dur : des toilettes publiques et une halle à viandes. Autour, des ruelles en plan cartésien délimitent des stands, par centaines. Chaque stand est une structure en bois portant un toit en tôle, en bâche ou en toile de sac de riz. Certains ont des murs en planches, d'autres non. Les vendeurs, désoeuvrés les trois quarts du temps, sont installés derrière les comptoirs ou quelquefois couchés sur leur étal parmi leur marchandise.

Je pose donc mon vélo chinois dans une rue avoisinante (sans antivol, car le vélo n'en dispose pas), et je m'engage dans une ruelle du marché. Je dois souvent marcher voûté parce que la hauteur des stands est calculée pour des Malgaches, plutôt petits dans l'ensemble.

Dans la partie du marché par où je commence, on vend des légumes. Il y a toujours des tomates, oignons, carottes, brêdes (sorte de goûteux épinard tropical), par tas énormes. Ils sont acheminés dans des paniers tressés empilés sur des chariots montés sur quatre roues de voiture et dirigés via un mécanisme de leviers. On trouve des bananes en abondance, mais les autres fruits, comme les ananas et les oranges, sont relativement luxueux et plus rares. Les mangues, abordables, commencent à arriver avec la fin de l'hiver.

Je passe ensuite dans l'énorme partie consacrée aux vêtements. Les stands sont isolés par des murs de pantalons et robes suspendus derière lesquels les badauds semblent jouer à cache-cache. La lumière qui filtre est vivement colorée par les tissus chattoyants. Des petits hauts-parleurs crachent des mélopées hachées et répétitives : prière musulmane ? Beaucoup de vendeurs (et leur marchandise) sont d'origine pakistanaise. Les sons sont atténués par les piles de vêtements et de chaussures. On trouve de tout, du slip à la veste en fausse fourrure, dans les marques les plus prestigieuses : D&G a du succès auprès des midinettes et Nike est présent en masse. Heureusement, les prix de ces imitations sont adaptés au contexte local. Les T-shirts à la gloire de Madagascar ne sont pas réservés aux touristes, ils se portent couramment.




Errer parmi les tissus m'a fait perdre tout à fait le sens de l'orientation. En m'imposant de marcher tout droit, j'émerge dans dans la partie où on vend le nécessaire pour le ménage : piles d'assiettes, brosses, bouteilles thermos en plastique, etc. Comme souvent, les magasins vendent tous la pratiquement les mêmes produits industriels. Ensuite, je passe des deventures d'ustensiles artisanaux : planches à pain en palissandre (bois dur dont l'exportation est interdite), casseroles forgées, paniers, plateaux en vannerie, petites râpes à légumes en fer plié, entonnoirs soudés à la main, etc. A côté on vend des épices, huile de coco, vanille, clous de girofle, miel en boutille, etc.

Ensuite, je passe dans la poissonnerie. Toamasina est en bord de mer, on y pêche toutes sortes d'espèces. Quand le poisson, et les crustacés (et la viande) sont soit frais du jour, ils sont vendus à l'extérieur du marché, en petites quantités. Ici, la chair est conservée salée, sèche ou fumée. Les grandes piles de poissons écartelés dans la pénombre et l'odeur à la fois marine et sèche saisissent l'imagination. Le coin est un bizarrement silencieux. C'est peut-être ici que l'ambiance de vieille ville portuaire est la plus prégnante.




J'émerge au bord du marché. Les stands sont remplis de cahiers, cartables, crayons, qui attestent que l'école reprend en début septembre. On vend de l'électronique bon marché (sur piles, l'électricité est un luxe) : montres, mini-radios, calculettes, etc.

En face du marché, des boutiques porposent par sacs de 50 kg des graines sèches : différents types de riz (Madagascar en consomme le plus au monde par habitant) et de farine (c'est là que je me fournis pour le pain), cacahouètes, haricots en tous genres, sucres, maïs. On pourrait craindre que les sacs ouverts attirent mouches ou mites, mais le rythme de consommation est tel que les oeufs des insectes sont cuits avant d'éclore...



J'aime ainsi flâner dans le bazar, acheter est un but secondaire. Je négocie rarement, ou pour le principe, car ce marché est trop peu touristique pour que les vendeurs aient souvent le réflexe de profiter du vazaha ignorant (parfois, les prix sont même affichés !). Quand il pleut, l'endroit devient une pataugeoire, et il faut marcher d'ilot en ilot par dessus les flaques de boue. Le Bazar Kely a mauvaise réputation : plusieurs personnes m'ont mis en garde contre les pickpokets. Ces inconforts ajoutent au charme de l'endroit, on est bien en Afrique.

1 commentaire:

maillot eric a dit…

bonjour je suis il de la reunion jetai a tamatave le moi de octorbre dans la nouvel hotel a bazar kely pour 1moi c t vraiment tres super a tamatave jai fai la rencontre d'une fille et on va bientot se mariée a tamatave en 2009 trop super la ville de tamatave bay